Voir&Agir

Accueil > Les films > ON N’EST PAS DES STEAKS HACHÉS

ON N’EST PAS DES STEAKS HACHÉS

Réalisation : Alima AROUALI et Anne GALLAND
Production : LA CATHODE

54 min, 2002

|
?

Il était une fois, l’hiver 2001-2002 à Paris, au Mc Donald’s du Faubourg Saint-Denis…
Pendant 115 jours, les 40 jeunes employés du McDo, pour la plupart petits Beurs et Blacks de banlieue, vont tenir tête au géant de la restauration rapide, jusqu’à la victoire ! Avec l’aide des nombreux militants de leur comité de soutien, ils découvrent le droit du travail et la lutte syndicale.
« Ça se passera plus comme ça chez Mc Donald’s ! »

LE RÉCIT DES RÉALISATRICES

La rencontre

En décembre 2001, lors d’une Assemblée Générale des intermittents du spectacle, des jeunes sont venus nous parler de la grève qu’ils menaient depuis plus d’un mois au McDonald’s du Faubourg St-Denis.
Nous sommes toutes les deux intermittentes du spectacle, travaillant l’une à l’image, l’autre au montage. Un statut doublement précaire : non seulement ce n’est pas facile de trouver du travail et de faire chaque année le nombre d’heures suffisant pour avoir droit aux indemnités de chômage, mais de plus ce régime spécifique est sans cesse remis en question et menacé. Nous étions donc une fois de plus mobilisées pour défendre nos droits, et voilà que ces jeunes sont venus nous interpeller. Eux aussi se débattaient dans un monde du travail aux tendances de plus en plus libérales. Nous ne savions rien de leurs problèmes. Ils nous touchaient. Ils nous renvoyaient à une situation de travail encore plus violente que la nôtre.
Nous avons été tout de suite d’accord : il y avait peut-être un film à faire, et ce film, nous avions envie de le faire ensemble. Dès le lendemain, nous partons en repérage.
Devant leur restaurant fermé, transis de froid, les jeunes grévistes se relayent pour faire le piquet de grève. Nous rencontrons aussi des militants du comité de soutien qui les entourent, syndicalistes, anti-mondialistes, “électrons libres”, dont l’une des tâches est de récolter des fonds pour permettre aux grévistes de survivre financièrement. Nous sympathisons.
On nous appelle quelques jours plus tard. Les grévistes viennent d’occuper leur restaurant. L’histoire est en train de se vivre. Si on ne se lance pas dans l’aventure du tournage sans attendre, il n’y aura pas de film. Alors on tourne.

Film sans producteur et sans diffuseur

Peu de temps après, nous prenons connaissance de l’appel d’offre de Télévision Création Citoyenne-TCC, qui cherche des projets. L’écriture d’un dossier nous permet de prendre du recul, de préciser nos intentions, de réfléchir à notre démarche de réalisatrices.
En attendant la réponse de TCC, nous continuons le tournage avec nos moyens. Nous suivons une histoire qui s’écrit d’elle-même, et dont nous ne connaissons pas la fin. Personne n’imaginait que cette grève allait durer aussi longtemps !
Notre film se construit au jour le jour. Il y a les rendez-vous fixes : les AG du mercredi soir à la bourse du travail de la rue de Turbigo, les “actions des samedis noirs” où l’on va tous en chœur occuper d’autres McDo. Pour les évènements ponctuels, il y a toujours quelqu’un pour nous prévenir. Parallèlement nous mettons en scène quelques séquences de dialogues avec certains des acteurs du mouvement dont la réflexion viendra enrichir les scènes de vie de notre film.

Une co-réalisation

Anne avait sa caméra, une PD150 Sony, tout à fait adaptée à ce genre de tournage, avec une deuxième piste son en plus du micro caméra. Mais il fallait quelqu’un au son ! Nous ne pouvions pas proposer de salaire, et nous ne savions pas combien de temps allait durer le tournage. Il fallait être très disponible et démarrer au quart de tour.
Alima s’est initiée à la prise de son. Nous nous sommes équipées d’un système HF qui nous permettait une autonomie de mouvement. Le fait d’être l’une à l’image et l’autre au son nous permettait d’être complémentaires. Nous co-réalisions. Cela a très bien fonctionné.
Nous avons eu la chance que TCC accepte notre projet, ce qui nous a permis de trouver notre producteur : la CATHODE, chez qui nous avons pu monter notre film. C’était important pour nous d’avoir un producteur, une structure professionnelle, une contrainte de finition. Cela nous a donné la force de continuer le travail que nous avions commencé.
Nous avons eu le temps nécessaire pour le montage, deux mois et demi. Ce temps nous a permis de réaliser le film qu’on voulait. Alima est monteuse. Nous avons, là encore, travaillé à deux. La plupart du temps, les productions imposent cinq, voire seulement quatre semaines de montage pour un documentaire, ce qui n’est vraiment pas suffisant pour un film qui se construit en grande partie à ce moment-là.

Un film militant

Nous étions partie prenante de cette grève. Nous pensions que ces jeunes avaient raison et nous étions de leur côté.
Nous avons vécu une expérience de solidarité extraordinaire, basée sur le respect mutuel, entre ces très jeunes grévistes qui avaient pris leur lutte en charge, qui négociaient seuls avec leur gérant et ces militants chevronnés qui mettaient au service de ces jeunes leur expérience et leur énergie, chacun selon ses compétences.
N’étant pas employées chez McDo, et n’ayant plus l’âge des grévistes, c’est naturellement dans le comité de soutien que nous avons trouvé notre place. Réaliser un film était notre manière de participer à cette lutte. Un film engagé certes mais avec une volonté de faire du cinéma. Notre regard est totalement subjectif, et nous le revendiquons comme tel. C’est délibérément que nous avons choisi de ne pas interviewer le gérant du McDo. Nous nous sommes intéressées aux acteurs de la lutte, à leur personnalité, à leurs motivations.
Nous avons eu la chance de filmer une belle histoire avec de beaux personnages et qui se finit bien.

Le public

Tous les gens à qui nous avons parlé de ce film ont envie de le voir.
C’est dans une vraie salle de cinéma, au “Magic Cinéma” de Bobigny, qu’a eu lieu l’avant-première, dans le cadre des deuxièmes rencontres du cinéma citoyen. Une soirée exceptionnelle, en présence des grévistes et des membres du comité de soutien.
Aujourd’hui, les salles s’équipent de vidéo projecteurs, des films documentaires sortent sur grand écran. Les festivals attirent de plus en plus de monde. De nouveaux réseaux de diffusion se mettent en place, associatifs et militants, pour un public qui manifeste de plus en plus d’intérêt pour ce cinéma qui raconte des histoires vraies.

Alima AROUALI
Anne GALLAND
Septembre 2002

LES RÉALISATRICES

Alima AROUALI est monteuse ; Anne GALLAND est cadreuse et réalisatrice d’un premier film documentaire : Portrait à quatre mains.
Elles militent depuis longtemps dans le même syndicat du spectacle, mais c’est sur un stage d’écriture de scénario, en 96, qu’elles se sont vraiment rencontrées.
En 99, Alima devient le personnage central du film d’Ali AKIKA : Enfants d’Octobre, dont Anne fait l’image.

FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Alima AROUALI et Anne GALLAND
Image : Anne GALLAND
Montage : Alima AROUALI
Mixage : Sophie BOMMART
Production : Roland MOREAU et Gabriel GONNET - LA CATHODE
Musique : chanson "MacDo MacStrike" de la Compagnie JOLIE MÔME

POUR PROLONGER LE FILM :

Réseau Stop Précarité

Commentaires

(aucun commentaire pour le moment)
DVD disponibles à l’achat
pour deux types de public et d’usage :

Soit pour un usage strictement privé
dans le cadre restreint du "cercle de famille"

Soit pour une "diffusion publique"
réservée aux associations et institutions.

L’association VOIR&AGIR encourage la pratique citoyenne des projections- débats, mais elle appelle également au respect des auteurs-réalisateurs et producteurs indépendants de documentaires sans lesquels il n’y aurait pas de pluralité d’expression. FERMER