Réalisation : Agnès DENIS
Production : Real Productions
Co-production : France 3, France 3 Lorraine Champagne-Ardenne, CRRAV, Callysta Productions
52 mn, 2008
Commerce | ConsommationLes grandes surfaces ont pris une place incontournable dans notre quotidien, mais nous sommes nombreux à ignorer le rôle de la grande distribution dans l’évolution économique et sociale du pays.
La disparition du commerce de proximité et de l’artisanat, celle des petits exploitants au profit d’une agriculture productiviste, les fermetures d’usine et leur délocalisation, le chômage qui en découle et son coût pour la société, la désertification des campagnes, les coûts énergétiques et environnementaux, la consommation standardisée imposée à tous, autant de choix culturels qui nous échappent…
Le consommateur a-t-il conscience du type de société qui peu à peu est imposée au citoyen ?
Réponse en images...
PRÉSENTATION DU FILM
La France est le pays européen qui possède la plus forte densité de grandes surfaces par habitant. On y trouve à peu près tout ce qui peut s’acheter. La plupart des enseignes qui se trouvent sur notre territoire appartiennent à sept grands groupes qui commercialisent la majorité de la consommation du pays, ce qui leur permet d’exercer leur puissance sur des milliers de fournisseurs.
Le supermarché a pris une place incontournable dans notre quotidien. Ce film souhaite répondre aux questions que beaucoup se pose à propos de la grande distribution. Quelle est sa responsabilité face aux délocalisations, à l’industrialisation de l’agriculture et à la désertification des campagnes et des centres villes ?
Des agriculteurs et des ouvrières du Nord, du Lot et Garonne et de la Vienne confient leurs difficultés et leur impuissance face à cette mécanique bien huilée qui les lamine et les élimine. Des voix issues de divers secteurs s’élèvent contre cette "hyper-puissance", des initiatives citoyennes se dressent sur son chemin, des politiques et des économistes pointent ses excès.
CE QU’EN DIT LA RÉALISATRICE
En 1949, quand l’épicier Edouard Leclerc ouvre son premier libre-service dans un hangar de Landerneau, il n’imagine certainement pas l’ampleur du succès que va connaître cette nouvelle forme de commerce. Les Français n’imaginent pas non plus combien l’emprise de la consommation de masse va progressivement changer leur vie, car si cette réussite
spectaculaire a des avantages, elle a aussi des coûts...
Il paraît que c’est pour le bien des consommateurs que la grande distribution exige des industriels et des agriculteurs des prix toujours plus bas qui les conduisent à licencier, délocaliser ou disparaître. Mais qui est mal payé, perd son emploi et doit, par ses impôts et cotisations,
réparer les dégâts sociaux d’un tel système ? C’est le consommateur-alibi, qui est aussi salarié et citoyen.
La croissance de la grande distribution s’est emballée avec la libre circulation des marchandises et des capitaux ; de ce fait, elle est au cœur du débat sur le type de développement auquel nous aspirons. Il ne s’agit pas de dénoncer seulement les excès les plus scandaleux de ce système, telles les marges arrière, les implantations illégales ou la surveillance abusive des employés des grandes surfaces, mais de montrer que c’est la logique même du système qui nous entraîne tous dans une impasse.
Dans cette réflexion sur un engrenage sans avenir, nous essayons de rendre compte, de faire les comptes et d’en demander à qui de droit.
ÉCHO D’UNE PROJECTION-DÉBAT
« La grande distribution n’a pas créé d’emplois ! Un emploi créé dans la grande distribution tue trois emplois dans le commerce de proximité ! » Cette phrase, saisie dans le film-documentaire d’Agnès Denis, Tous comptes faits, n’est pas sortie de la bouche d’un altermondialiste échevelé mais de celle de Jean-Paul Charié, député UMP du Loiret, rapporteur de la loi de modernisation de l’économie.
Le reste du film est sur le même ton, avec des intervenants aussi variés que des déléguées CGT de l’entreprise Marie Surgelés ou Christian Jacquiau, auteur du très polémique Les Coulisses de la grande distribution en 2000, sans oublier Antoine-Jean, éleveur et porte-parole de la Confédération paysanne dans le Nord - Pas-de-Calais.
L’ambition de la réalisatrice était de démontrer que la grande distribution, par son mode de fonctionnement et sa grande concentration influence toute la société, l’agriculture, l’industrie... Selon le film, les grandes enseignes auraient provoqué, au fil des années, une dégradation de la qualité des produits, des conditions de travail dans les entreprises, encouragé les délocalisations... Des accusations graves qu’aucun représentant de la grande distribution n’a voulu commenter, selon Agnès Denis.
À l’issue de la projection, les spectateurs ont longuement interrogé les organisateurs et la réalisatrice. Les questions ont principalement tourné autour de l’agriculture : « Quel est le prix de cette politique pour la santé des consommateurs ? », s’est notamment inquiétée une spectatrice, soucieuse de ne pas trouver de pesticides et autres composés chimiques dans son alimentation. Antoine-Jean s’est voulu rassurant : « Il y a plein de solutions pour contourner la grande distribution. Mais il faudra passer par le législatif pour s’en sortir la loi de modernisation de l’économie ne changera rien ».
Le mot de la fin est revenu au responsable de la programmation du Méliès, Antoine Tillard : « Il n’y a pas que l’agriculture qui craint la grande distribution. Le Méliès aussi est inquiet : en novembre va ouvrir, à côté d’ici, un complexe de 12 salles. UGC est un des cinémas de circuits les plus gourmands et nous sommes déjà la région, et la métropole, où il y a la plus forte concentration de multiplexes. »
Article de Franck BAZIN dans La Voix du Nord - Édition Villeneuve d’Asq
POUR PROLONGER LE FILM
Il y a, bien sûr, le livre Christian JACQUIAU : Les Coulisses de la grande distribution et, pour une entrée en matière, l’entretien avec l’auteur sur le site d’Action Consommation. Il y a aussi l’invitation à "Agir ensemble pour une économie équitable" que nous propose MINGA